15 Dec, 2022

GAIN I Le groupement des entreprises aéronautiques de Suisse romande continue de s’agrandir

Le GAIN a été créé en 2017 sous l’impulsion de quatre entreprises genevoises et de l’État de Genève. Il est hébergé depuis au sein de l’Office de Promotion des Industries et des Technologies (OPI). L’organisation accueille aujourd’hui une quinzaine d’entreprises romandes actives dans le secteur aéronautique. Fanny Barakat, secrétaire générale du GAIN, a accepté de nous en dire plus sur l’historique du groupe et ses activités.

 

Propos recueillis par Marina Hofstetter

Comment est né le GAIN et à quels besoins répondait-il ?

Le GAIN est le groupement des entre- prises aéronautiques de Suisse romande. Il est né sous l’impulsion de l’État de Genève et de quatre entreprises genevoises en 2017, avec le soutien de l’Office de Pro- motion des Industries et des Technologies (OPI) où il est actuellement hébergé. Les quatre entreprises fondatrices, à savoir Niklaus LNI, Mercury Systems, Jean Gal- lay et Saint Jean Aero, exprimaient à l’époque le besoin de réunir autour d’une même table les acteurs du secteur de l’industrie aéronautique et des centres de recherche, ainsi que les autorités publiques, afin de travailler ensemble sur des enjeux communs. Le but était entre autres de soutenir leur croissance et leur rayonnement au niveau international.

 

Qu’en est-il aujourd’hui ?

Aujourd’hui, le groupement a pour but de stimuler sur le plan local, national et international, l’attractivité et la compétitivité de ses membres au travers de projets collaboratifs. Par ses projets, GAIN participe au dynamisme du tissu économique en mettant en valeur la base industrielle et technologique de Suisse romande et contribue à un monde plus sûr et décarboné. GAIN est un réseau de PME et ETI (Entreprises de Taille Intermédiaire, ndlr) particulièrement qualifiées, qui, grâce à leurs compétences technologiques spéci- fiques, participe à la compétitivité de l’industrie aéronautique et spatiale suisse.

 

Quels sont les champs d’action du GAIN actuellement ?

Afin d’accompagner le développement de l’industrie et de faire face aux défis de la concurrence internationale, le groupe- ment s’est fixé dès 2017 trois axes stratégiques : promouvoir et maintenir l’attractivité de ce pôle industriel d’excellence ; renforcer le réseau national de PME et ETI qualifiées et hautement performantes en favorisant les échanges d’information et d’expériences ; et développer l’effort de recherche et de développement ainsi que les synergies entre ses membres face à la concurrence internationale.

 

Pièces d’avions, hélicoptères, drones, moteurs, équipements, systèmes de dé- fense : c’est assez pu connu mais 80 % de ce qui vole dans le monde possède des pièces aéronautiques romandes. L’export était donc l’un des objectifs principaux de l’action du GAIN, et ce dès son commen- cement. Les règles liées à l’export et à la participation au Programme Air2030 de la Confédération (renouvellement des avions de combats suisses) impliquent régulièrement des compensations qui, si elles sont bien maitrisées par les grandes en- treprises comme RUAG par exemple, sont souvent trop complexes à appréhender pour les PME.

Dans ce cadre, le groupement exhorte notamment les autorités publiques et les grandes entreprises industrielles ayant eu une première expérience avec les affaires compensatoires à soutenir les PME dans le cadre des affaires compensatoires (off- sets). Répondre de manière coordonnée à ces affaires était donc un des premiers objectifs du GAIN.

Progressivement, les membres ont défini d’autres grandes priorités de coopération, notamment en termes de qualité, d’innovation et de décarbonation. C’est un groupement qui se veut, avant tout, agile.

Le GAIN a également souhaité s’ouvrir et accélérer la coopération entre les startups et les entreprises de la filière aéronautique. Nous avons modifié nos statuts pour cela et accueillons depuis cette année nos premières talentueuses jeunes entre- prises, dont Pie Aeronefs et LD Switzerland. Cela vise à apporter de nouveaux atouts en termes d’innovations, de produits, de services et d’usages.

Aujourd’hui, les entreprises membres du GAIN s’engagent tous les jours dans la production des équipements aéronau- tiques et dans l’innovation, afin de contri- buer à la haute qualité des composants et des services si chère à la Suisse. Le groupement est structuré autour de 3 branches : Électronique, Mécanique et Services. Ces capacités industrielles et technologiques doivent disposer d’un écosystème et de conditions cadres suffisantes pour pouvoir se développer.

Combien d’entreprises font partie du GAIN et quels sont les avantages pour elles d’adhérer au groupement ?

Le groupement est composé de 14 entreprises de tailles différentes. En 2021, GAIN représente plus de 5300 emplois en Suisse romande, plus de 1,5 milliard de chiffre d’affaires, et environ 20 % du budget consacrés à la Recherche et Développement (R&D). Les membres participent à la stratégie du GAIN et font bénéficier les autres sociétés de leurs compétences ain- si que de leur réseau. Ils offrent leur temps sur des projets spécifiques, et leurs conseils guident l’action du Secrétariat basé à Genève. Les membres sont béné- voles, mais les bénéfices de l’adhésion sont multiples : les partages et retours d’expérience, d’aide, de soutien et de conseils pour se développer ; l’accès aux commissions thématiques et aux projets menés au sein du GAIN ; l’organisation de workshop et de séances d’informations avec des intervenants extérieurs ; l’accès à des revues de presse hebdomadaires et de veilles commerciales, technologiques et politiques ; l’accompagnement sur les salons aéronautiques nationaux et internationaux ; la promotion des savoir-faire des membres au sein des médias et ré- seaux sociaux ; l’accompagnement sur des projets entre entreprises et Hautes Écoles (Innosuisse, EU Interreg, etc.) ; et l’aide à la recherche de partenaires pour le trans- fert de savoirs et de technologies.

 

Le GAIN a été initié par l’État de Genève : le groupe- ment accueille-t-il également les entreprises des autres cantons francophones ?

Au départ en effet, et c’est visible dans le nom du groupement, le GAIN concernait uniquement les entreprises genevoises. Sous l’impulsion de demandes d’adhésion d’entreprises extérieures au canton, l’organisation a modifié ses statuts en 2020 afin que le groupement puisse s’étendre plus largement à la Suisse romande. Dès lors, nous avons pu accueillir des entre- prises des autres cantons francophones. Par exemple, 7 entreprises vaudoises et une entreprise neuchâteloise sont membres et participent à l’ensemble des projets.

Alors concrètement, quelles sont vos actions ?

Nos actions prennent essentiellement la forme de commissions thématiques. Ces commissions répondent aux besoins exprimés des entreprises membres. La Commission Affaires, lancée en 2020, traite de l’obtention d’affaires compensatoires découlant du Programme Air2030, et du thème des exportations. « Être un moteur technologique pour la région » est le sujet principal de la Commission Innovation : l’industrie aéronautique est une puissante locomotive du progrès scientifique et technologique, génératrice de nombreuses avancées, d’emplois et retombées sur les autres branches industrielles. GAIN a consacré en moyenne plus de 20 % de son CA global 2021 à la R&D, entre autres sur les thèmes drones et hy- drogène.

La Commission Qualité, lancée en 2020, propose des formations mutua- lisées (audit interne, LEAN/OPEX, etc.) pour les responsables qualité des entre- prises membres, et mène des projets de recherche sur l’amélioration du contrôle qualité via l’intelligence artificielle avec les Hautes Écoles et Universités de la région. Un autre sujet traité est celui de l’employabilité : faire du domaine aéronautique un secteur créateur d’emplois qualifiés en Suisse. Les sociétés adhérentes au GAIN représentaient déjà près de 5300 emplois sur le territoire romand en 2021. Le secteur est composé de métiers très diversifiés à fortes compétences techniques, et fait appel à des compétences qualifiées de tous niveaux.

 

Pour terminer, nous avons la Commission Décarbonation, lancée en 2021, qui vise à réduire les émissions car- bone (scope 1, 2 et 3) via un programme d’accompagnement avec le Swiss Triple Impact (STI) de B Lab. Des bilans carbone et des installations énergétiques effi- cientes font l’objet de réflexions et de dis- cussions aujourd’hui au sein de la Com- mission. L’aéronautique est un secteur au poids non-négligeable en ce qui concerne le réchauffement climatique. Il représente en effet entre 2 et 3 % du total des émis- sions mondiales de CO2 d’origine humaine, ce qui impose de progresser vers plus de sobriété énergétique et une décarbonation généralisée.

Existe-t-il d’autres groupements comme le vôtre ?

Au niveau de la Suisse romande, il n’existe pas d’organisation équivalente avec lesquelles nous pourrions collaborer. Nous sommes cependant ouverts à diverses collaborations, notamment avec le Groupe Romand pour le matériel de Défense et de Sécurité (GRPM). Les activités du GRPM sont plus axées sur du lobbysme, ce qui nous permet par leur présence à Berne d’être également représentés. De notre côté, nous nous attachons d’avantage à mener des projets de recherche, à créer de la collaboration inter-entreprises. Ce sont donc deux manières différentes mais complémentaires d’agir.

Nous collaborons également régulièrement avec le Swiss Aerospace Cluster (SAC) et Swiss- mem. D’autres initiatives se développent ailleurs pour soutenir cette industrie in- novante. Récemment, le swiss aeropole a été créé à Payerne, et nous allons certainement prendre contact avec eux.

Sur quels sujets collaborez-vous par exemple ?

Le GRPM et Swissmem sont en contact direct avec le bureau des offsets à Berne, qui travaille sur mandat de l’Office fédéral de l’armement (armasuisse) sur les différents programmes d’affaires compensa- toires liés à l’acquisition de matériel du Département fédéral de la défense (DDPS). Les offsets sont les affaires compensatoires que j’ai mentionnées précédemment. En matière de politique d’armement, dont fait partie l’achat des 36 nouveaux avions de combat F-35A et le Patriot pour la défense sol-air, les affaires compensatoires permettent de soutenir, et ce malgré les acquisitions à l’étranger, le maintien et le développement en Suisse de technologies centrales importantes pour la sécurité ainsi que de compétences et de capacités industrielles clés. Dans le cadre de l’achat des avions de combat par exemple, le Conseil fédéral s’assure autant que possible de la juste répartition des offsets dans les régions : 30 % de la valeur totale du projet doit être investit en Suisse romande, 65 % en Suisse alémanique, et 5 % dans le Tessin. Les affaires compen- satoires sont un sujet assez complexe, et Swissmem et le GRPM nous soutiennent dans cette démarche.

Pour en revenir à vos actions, comment sont-elles décidées ?

Les actions sont définies en fonction des besoins des entreprises membres. Notre focus premier est l’aéronautique, mais d’autres domaines sont d’intérêts pour les membres tels que l’énergie avec l’hydrogène, le ferroviaire, les drones ou encore le spatial. Il y a donc le besoin, mais aussi la disponibilité des membres. À par- tir de 5 entreprises intéressées par un sujet en particulier, nous pouvons com- mencer à travailler, et éventuellement créer des partenariats si nécessaire. Ces partenariats pourront ensuite déboucher sur un projet de recherche et développe- ment collaboratif pour lequel des fonds pourraient être nécessaires. Avant cela, comme je l’ai précisé auparavant, tout est bénévole. Mais c’est finalement dans l’in- térêt de tous les membres de participer aux commissions et au développement de partenariats.

Avez-vous un exemple concret ?

Au niveau de la Commission Qualité, nous organisons des formations mutuali- sées entre tous les responsables qualité des entreprises membres. Ces formations sont pertinentes pour le secteur aéronau- tique, il s’agit par exemple des formations ISO 190011 – EN 9100 ou encore LEAN/ OPEX. Il y a à la fois un intérêt financier mais aussi de mise en réseau et d’échange de savoir-faire. Nous créons ainsi un éco- système et un environnement stimulant pour toutes et tous.

Que voyez-vous pour l’avenir du GAIN ?

Toujours plus de collaborations entre les acteurs, de synergies entre les membres et de mutualisations des res- sources au bénéfice d’un monde aéronau- tique plus sûr et décarboné. GAIN va donc continuer à veiller à la meilleure coopéra- tion entre les parties prenantes notam- ment en œuvrant pour la décarbonation du secteur, en contribuant à consolider la base technologique et industrielle suisse et en relevant les défis de demain qu’ils soient énergétiques, environnementaux, technologiques et humains. Nous veille- rons à maintenir des liens étroits avec les différents écosystèmes aéronautiques na- tionaux et étrangers afin de répondre au besoin du marché et des maîtres

Groupement d’entreprises // DOSSIER AÉRONAUTIQUE